mardi 10 décembre 2019

Génocide des Rohingyas: Aung San Suu Kyi devant la Cour Internationale de Justice



Aung San Suu Kyi

Le procès sur le génocide de la minorité musulmane Rohingya en Birmanie (ou Myanmar) s'est ouvert le Mardi 10 décembre 2019 devant la Cour internationale de justice à La Haye (CIJ) 
C’est en tant que ministre birmane des Affaires étrangères et conseillère d’État que la prix Nobel Aung San Suu Kyi mènera la délégation chargée de défendre la junte militaire birmane. L'ancienne dissidente et icône de la démocratie, qui a laissé la tragédie des Rohingya se dérouler, présentera la version officielle birmane à savoir que les opérations militaires contre les Rohingya s'inscrivent dans une politique antiterroriste.

Aung San Suu Kyi a vu son image ternie au niveau international depuis son soutien aux généraux de l'armée, mais en Birmanie elle bénéficie d'un large soutien populaire en surfant sur le sentiment bamar (l’ethnie majoritaire bouddhiste) nationaliste anti musulman. Un an avant les élections législatives, ce déplacement à la Haye s'inscrit dans une stratégie politique interne.


C'est la Gambie, mandatée par les 57 États membres de l’Organisation de la coopération islamique prêts à financer la procédure, qui a saisi la Cour internationale de justice le lundi 11 novembre 2019.

"Les actes génocidaires commis au cours de ces opérations visaient à détruire les Rohingyas en tant que groupe, en tout ou en partie, par le recours au meurtre de masse, au viol et à d’autres formes de violence sexuelle", a déclaré la Gambie dans sa communication à la Cour.

Depuis août 2017, près d'un million de Rohingyas  sont arrivés au Bangladesh (où vivaient déjà 200 000 réfugiés Rohingyas) fuyant les exactions de l’armée birmane et des milices bouddhistes. Les 600 000 Rohingyas vivant toujours en Birmani restent sous la menace "d’actes génocidaires".

La CIJ n’a établi qu’une seule fois qu’un génocide avait été commis c'était pour le massacre de 8 000 hommes et garçons musulmans en 1995 à Srebrenica, en Bosnie.

Cette cour devra “examiner la responsabilité de l’État birman et déterminer si la Birmanie a commis ou a échoué à empêcher un génocide dans le nord de l’Arakan” contre la minorité musulmane des Rohingyas


Elle devra également statuer sur des demandes de réparations: retour des réfugiés Rohingyas, respect de leur citoyenneté et de leurs droits, protection contre la discrimination.
La procédure pourrait durer plusieurs années avant d’être tranchée, mais la Gambie demande à la CIJ de prendre des mesures immédiates avant de se prononcer sur le fond, en ordonnant l’arrêt des crimes en cours.


D'autres poursuites sont en cours: 
- La Cour pénale internationale a également été saisie à propos de crimes contre l'humanité visant des généraux birmans.
- En Argentine une plainte a été déposée contre Aung San Suu Kyi et des hauts gradés birmans au nom du principe de la compétence universelle.







En savoir plus

Abubacarr Tambadou, ministre de la Justice gambien et ancien procureur du tribunal pénal des Nations unies pour le Rwanda, ne veut à aucun prix fermer les yeux sur les atrocités commises contre les Rohingya. Le souvenir cuisant de l’inaction face au génocide des Tutsi le hante. La Gambie agit au nom des cinquante-sept membres de l’Organisation de la coopération islamique, prête à financer la procédure. La convention de Genève de 1948 fait obligation à tous les États d’empêcher la perpétration d’un génocide. Un impératif jusqu’ici négligé, mais qui permet à la Gambie de saisir la CIJ contre un pays situé à plus de dix mille kilomètres de ses frontières. L’accusation s’appuie sur les enquêtes des Nations unies concluant à l’« intention génocidaire » de l’armée birmane.

Les prix décernés à Aung San Suu Kyi 
Le Musée américain de l'Holocauste retire un prix accordé à Aung San Suu Kyi




lundi 2 décembre 2019

Le pont Alexandre III, pont de l'honneur?

Le Pont Alexandre III

Les Français sont invités à se rendre, le lundi 2 décembre à 11h30, sur le pont Alexandre III pour un dernier hommage au passage du cortège des treize militaires français morts au Mali.

L’hommage populaire sur le pont Alexandre III est une initiative du gouverneur militaire de Paris qui remonte à 2011. « A chaque fois qu’un soldat meurt en opération extérieure ou en service commandé et qu’un hommage est rendu aux Invalides, le gouverneur militaire invite les Français à s’y rendre »

Mais qui est Alexandre III et pourquoi ce pont porte-t-il son nom ?
Pourquoi ce pont, que certains ont surnommé "pont de l'honneur", porte-il le nom d'un chef d'état symbolisant un pouvoir autocrate et antisémite? Un homme dont la politique antisémite se basait sur "Un tiers des Juifs sera converti, un tiers émigrera, un tiers périra" et qui disait un an avant sa mort "Les Français sont le peuple le plus infect du monde…on ne s’allie pas avec la pourriture "?


Depuis le déboulonnage des statuts de généraux confédérés aux États-Unis, le débat est relancé sur l'utilisation de noms de personnalités controversés pour des rues, monuments ou établissements publics.



Alexandre III de Russie
https://dictionnairedespersonnalites.blogspot.com/2019/12/alexandre-iii-de-russie.html
http://www.expositions-universelles.fr/1900-alexandre-3.html



dimanche 24 novembre 2019

Chili: assassinat de la reporter-photographe Albertina Martinez Burgos





Albertina Martinez Burgos


Albertina Martínez Burgos, 38 ans, photographe et reporter chilienne qui couvrait les manifestations au Chili a été retrouvée morte chez elle le jeudi 21 novembre. Ses disques durs et toutes ses photos ont disparu. Sa famille réclame une enquête indépendante sur  ce décès qu'elle qualifie d'assassinat politique.

Des manifestations secouent le Chili depuis le 7 octobre en réaction à l'augmentation du prix de métro (annulée depuis), mais elles continuent en réclamant un Chili plus juste avec un changement profond du modèle politico-économique légué par la dictature d’Augusto Pinochet.
Des manifestations gigantesques ont eu lieu le 25 octobre dans les grandes villes du Chili , à Santiago plus de 1,2 million de personnes sont descendues dans la rue, du jamais vu dans une ville de 8 millions d’habitants. C'était la plus importante mobilisation au Chili depuis l'arrivée au pouvoir des civils.
Le gouvernement a répondu par la répression, depuis le début de la crise il y a eu au moins 22 morts et 20000 blessés. Parmi les blessés la police a éborgné près de 200 manifestants qui ont depuis été érigés en symbole de la répression. Amnesty Internationale parle de "répression inédite" avec « l’intention de blesser et punir la population qui manifeste ».

Les militants chiliens attirent l'attention sur les assassinats de militants supposés dissuader toute poursuite de la révolte, surtout en visant des femmes. En effet une autre femme très impliquée dans ces manifestations Daniela Carrasco, artiste de rue de 36 ans, a été retrouvée pendue à un arbre. Elle aurait été violée et torturée avant de mourir. L'hypothèse du suicide a aussi été avancée.

(ci-dessous quelques clichés réalisés par Albertina Martinez Burgos lors des dernières manifestations au Chili)











vendredi 22 novembre 2019

Qui était Almaas Elman tuée par balle en Somalie?



Almaas Elman
Une famille au service de la paix à nouveau endeuillée. 

Certaines personnes travaillent au risque de leur vie avec acharnement sur le terrain, changent la vie d'autrui, sans projecteurs médiatiques et disparaissent de façon brutale dans un silence assourdissant. 

Une femme qui aurait pu avoir une vie paisible sous des cieux plus cléments et qui a préféré s'investir dans son pays d'origine, pays à risque.


Almaas Elman, militante des droits de l'homme canado-somalienne, enceinte, a été tuée par balle à Mogadiscio le mercredi 20 novembre au bord de sa voiture alors qu'elle se rendait à l'aéroport pour aller à Nairobi où elle séjournait. Le cameraman Said Fadhaye à ses côtés dans la voiture a parlé d'une attaque perpétrée par plusieurs personnes. 


Almaas Elman fait partie d'une famille d'activistes: son père Ali Ahmed et sa mère Fartuun Adan créent le centre Elman Peace pour promouvoir la paix.

Son père est assassiné en Somalie en 1996. Sa mère demande l'asile politique au Canada et quitte la Somalie avec ses enfants en 1999. Elle y retourne en 2017 pour poursuivre le travail associatif via le centre Elman Peace, elle est rejointe par sa fille Ilwad Eman qui figurait sur la liste des candidats au prix Nobel de la paix en octobre dernier.

Almaas Elman les rejoint en Somalie pour apporter son aide aux activités du centre Elman peace: reconstruction du pays, aide aux victimes de violence sexuelle,aide à la scolarisation des enfants et abandon des armes.
Almaas Elman devait assister à une réunion du centre Elman peace quand elle est tombée sous les balles.

Le gouvernement somalien déclare qu'une enquête est ouverte pour déterminer si c'est une balle perdue ou si la jeune femme a été sciemment visée.

Les shebab, affiliés à Al-Qaïda, chassés en 2011 contrôlent toujours des zones rurales d'où ils mènent des attaques et des attentats-suicides.


mercredi 30 octobre 2019

Prix Sakharov 2019: Ilham Tohti

Ilham Tohti (Droits réservés)

Le prix Sakharov 2019 a été décerné le 24 octobre 2019 à Ilham Tohti, économiste et dissident ouïghour emprisonné. La cérémonie de remise de prix aura lieu le 18 décembre 2019 au Parlement de Strasbourg.

Le prix Sakharov distingue des personnalités ayant apporté "une contribution exceptionnelle à la lutte pour les droits de l’Homme dans le monde".

Ilham Tohti est né le 25 octobre 1969 à Artux (ville de la région autonome du Xinjiang).
Il est professeur d'économie et militant des droits de l'homme et des droits de la minorité ouïghoure en Chine.  
Son blog Uyghur Online mettait en avant les discriminations dont sont victimes les Ouïghours et militait pour une autonomie régionale. Ses critiques de la politique gouvernementale envers les Ouïghours lui valent une première arrestation en juillet 2009 et une fermeture de son blog. Il sera libéré le 25 août 2009 et assigné à résidence.

Ilham Tohti continue à dénoncer les discriminations subies par les Ouïghours. En 2014 il est arrêté et ses ordinateurs et travaux de recherche saisis. Au terme d'un procès de deux jours il est condamné à perpétuité pour séparatisme.

Les Ouïghours sont des musulmans sunnites de la région du Xinjiang qui ont toujours lutté contre les politiques d'assimilation chinoises visant à gommer les spécificités de leur mode de vie. L'état chinois répond aux revendications par la répression sous couvert de lutte contre le terrorisme islamiste. Depuis 2017 plus d'un millions de Ouïghours sont détenus dans des camps d'internement où on les contraint à renoncer à leurs croyances religieuses.

Ce génocide culturel continue dans un silence international assourdissant. 







Les finalistes du prix Sakharov 2019

Marielle Franco, Chef Raoni et Claudelice Silva dos Santos
  • Marielle Franco: militante des droits de l'homme brésilienne bisexuelle assassinée en 2018
  • Chef Raoni: figure emblématique de la lutte contre la déforestation en Amazonie
  • Claudelice Silva dos Santos: écologiste (lutte contre la déforestation) et militante des droits de l'homme brésilienne
The Restorers: 5 étudiants Kenyans,  Stacy Owino, Cynthia Otieno, Purity Achieng, Mascrine Atieno et Ivy Akinyi, ont développé une application d'information et d'aide sur les mutilations génitales.


Ilham Tohtiéconomiste et dissident ouïghour emprisonné

Finalistes du prix Sakharov 2019

Lauréats du Prix Sakharov (extrait tableau)